Septembre, 2020

Two Works

ven18sep(sep 18)14 h 00 minsam31oct(oct 31)18 h 00 minTwo WorksDaniel Gustav Cramer Musées d’Aurillac – Les Écuries des Carmes, 37 Rue des Carmes, 15000 Aurillac

Détail de l'événement

« Je suis resté deux mois au Japon. Sur le chemin du retour vers notre maison à Kyoto après avoir visité un étang dans un temple bouddhiste du département de Seki, nous conduisions sur de petites routes sinueuses, au milieu des rizières et des forêts. Alors que nous traversions une rivière, les nuages se sont écartés et un rayon du soleil couchant a éclairé un coude de cette rivière, là où des enfants jouaient avec des pistolets à eau. La brume descendait lentement le long de la rivière, illuminée par le soleil, enveloppant les enfants. Je me suis arrêté, suis sorti de la voiture, et en quelques minutes seulement le soleil avait disparu derrière les montagnes et les enfants étaient sortis de l’eau.
Cet épisode m’est resté en mémoire tout le long de mon séjour au Japon. Depuis mon retour, ce moment a pris de plus en plus d’importance, et pendant des semaines, dans la chambre noire, j’ai revisité ce pont et cette rivière, encore et encore. »
Daniel Gustav Cramer, 2020

Pour la réouverture au public de l’espace d’exposition de La Sellerie, les Musées d’Aurillac ont souhaité inviter Daniel Gustav Cramer à présenter une nouvelle série d’images. Depuis le début de sa carrière, la pratique de cet artiste conceptuel allemand se partage entre photographie, écriture de courts textes, vidéo et sculpture, conduisant autant à l’exposition qu’à la publication de livres. Avec le paysage comme point de départ – une forêt obscure, un lac de montagne, l’océan –, ses oeuvres prennent la forme de micro-récits dont le sens se révèle progressivement dans la succession des images. La dimension narrative y est assurément essentielle : chaque fragment, aussi petit soit-il, contribue à l’existence des histoires que Daniel Gustav Cramer met en place. Ces récits tiennent d’ailleurs souvent à peu de chose et les ellipses y sont monnaie courante. Rien n’y est explicite, de telle sorte que les histoires ne sont réellement complètes que dans l’esprit de celui qui les regarde et en assemble les morceaux.
Particulièrement représentative, la série « Tales », initiée en 2000, montre des séquences de photographies organisées en diptyques, triptyques ou en groupes d’images plus conséquents. À chaque fois, un paysage y est photographié de loin, avec un petit élément qui ponctue la scène.
D’une image à l’autre, cet élément se déplace ou se modifie, constituant ainsi le noeud d’un récit : un pneu qui roule dans le désert et avance vers le premier plan, une barque qui file sur l’eau jusqu’à disparaître du cadre, des personnes qui marchent sur une passerelle au bord de la mer, une femme âgée pensive à sa fenêtre. Ces scènes ouvertes à l’interprétation ont également fait l’objet de publications, chacune de ces petites histoires pouvant aboutir à un livre à la sobriété formelle affirmée, contenant uniquement une séquence d’images, sans texte.
Pour son exposition à Aurillac, Daniel Gustav Cramer propose une installation inédite de 21 tirages formant une seule et même histoire. Celle-ci prend place dans un paysage photographié au Japon, composé d’une rivière de montagne, d’une plage de galets et de quelques rochers.
Sur certaines images apparaissent des adolescents qui se baignent, jouant avec des pistolets à eau sous l’ombre des arbres qui bordent la rivière. Une légère brume flotte au-dessus de l’eau, teintée de la lumière dorée de la fin de journée. Puis le brouillard s’intensifie, jusqu’à recouvrir peu à peu la rivière et les adolescents. Quand il se dissipe, les adolescents ont disparu.
On ne sait combien de temps a pu s’écouler entre les premiers clichés et les derniers. À l’image de ronds dans l’eau, la dimension narrative de cette série s’épanouit avec le temps : à première vue, il ne semble rien s’y passer vraiment, rien de spectaculaire dans tous les cas, mais l’impact des changements dans le paysage, d’abord imperceptible, s’amplifie à mesure que l’on contemple les images. Le récit est minimal – on a ainsi pu parler de « proto-cinéma » à propos des séquences de photographies de Daniel Gustav Cramer – et pourtant il ne cesse de gagner en densité image après image, semblable à ce brouillard de montagne, au départ vaporeux et qui devient de plus en plus épais.
Une autre histoire (Wycliffe Well, Northern Territory, Australia, July 2009, datée de 2011), sous forme de texte cette fois, est aussi disposée dans la salle d’exposition. Il y est question de rencontre inattendue, de présence et d’absence, comme un écho discret à l’installation photographique.
commissariat : Lilian Froger

Dates

Septembre 18 (Vendredi) 14 h 00 min - Octobre 31 (Samedi) 18 h 00 min(GMT+00:00)